Premiers pas en politique : témoignage sur les motivations d’un engagement dans le cadre d’une fonction d’élue.

Publié le par Groupe des élus EE au Conseil régional

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Premiers pas en politique : témoignage sur les motivations d’un engagement dans le cadre d’une fonction d’élue. 

 

Par Patricia Andriot

 



Non engagée dans la vie politique jusqu’alors, il m’a été proposé d’être tête de liste départementale aux dernières élections régionales pour défendre le projet d’Europe Ecologie.


Ce mouvement politique jeune, qui se caractérise par une volonté d’ouvrir et de renouveler l’approche politique,  a pour cela fait le choix de composer ses listes électorales avec une parité de personnes encartées au parti des Verts et de personnes issues de la société civile. C’est dans ce contexte, qu’il m’a été proposé de m’engager dans l’aventure politique.  


Sans faire ici, un plaidoyer politique partisan, je me propose juste dans le cadre de ce papier de revenir sur l’enjeu, sur les motivations qui m’ont conduite à cet engagement, et sur ma perception de la fonction d’élue.  

La politique au sens noble du terme, c’est débattre du mode d’organisation de la vie en société, c’est considérer que cette organisation n’est pas inéluctable, mais résulte de choix collectifs, qui peuvent être différents. C’est considérer que des alternatives différentes en matière de projet de société existent.  


Le XXème a été barbare, meurtrier, et des camps nazis, au communisme, en passant par les dégâts du néo-libéralisme économique,  l’alternative politique a été expérimentée au plus haut point, avec les résultats que l’on connaît ;  le poids de cette lourde histoire, le poids de l’économie et les effets de la mondialisation qui empêcheraient toute marge de manœuvre au niveau des Etats, les crises économiques et environnementales, … tout invite à penser que finalement la politique est impuissante, que la capacité de l’homme a maitriser son organisation collective est une illusion, et que finalement mieux vaut s’inscrire dans une stricte logique gestionnaire, que dans une logique de projet anticipateur. Le consensus de la sociale-démocratie économico-libérale actuelle serait donc finalement un horizon indépassable.


Nos sociétés seraient devenues trop complexes pour être maitrisées et  l’heure ne serait pas aux grands projets de société pour l’avenir, mais à la gestion boutiquière des difficultés actuelles. A l’économie libérale de donner le ton de l’organisation collective, de donner de l’emploi, de créer de la richesse, et à l’espace politique de courir derrière pour protéger la sphère individuelle et la capacité d’action de l’acteur économique et pour panser les plaies les plus béantes qui remettent en cause l’ordre social. 


On peut au contraire penser, que c’est justement parce que nous sommes dans une période de mutation structurelle, aussi importante que celle de la révolution industrielle, qu’il convient de se prendre en main, de rappeler que plus que jamais, l’homme dispose d’un libre arbitre et que l’organisation sociétale est d’abord le résultat de choix.  


L’organisation de la société répond à la logique d’un gâteau à partager : comment  et par qui est fait le gâteau ?  qui peut en manger ? comment il est partagé ?


Dire que la politique ne sert à rien, c’est dire qu’il n’y a qu’une sorte de gâteau possible, qu’une recette, qu’une façon de le faire, de le partager, ..


Comment créer de nouvelles richesses ?  quelles nouvelles richesses crées ? par qui ? comment s’organiser pour les partager ?  


Dans une période de crises multiples, économique, sociale, environnementale, il est indispensable de rappeler que faire de la politique, même modestement, même au niveau d’une commune, ou d’un conseil régional, c’est juste se poser la question de comment vivre ensemble, penser que tous les choix ne se valent pas, organiser le débat pour que cela soit partagé, et faire quelques arbitrages.   


Il convient de rappeler que nombre de choix organisationnels de la société actuelle, structurée après la seconde guerre mondiale, sont issus du Conseil National de la Résistance, et donc décidés en 1943 /1944, à un moment ou notre pays était à genou, menacé d’un risque de protectorat américain, ruiné par des efforts de guerres, et occupé par une puissance étrangère. Nous aurions aujourd’hui moins de latitude qu’à cette époque pour faire des choix ? la France serait maintenant plus pauvre qu’à cette époque ?


Des personnes, des résistants communistes ou gaullistes ont alors su se rassembler un temps, pour être audacieux et penser la société en termes d’avenir, de projet collectif, et pas simplement en logique gestionnaire de court terme. 


S’engager en politique, quelque soit le niveau du mandat, c’est considérer, que nous pouvons modestement et collectivement, porter le débat autour d’alternatives possibles,  faire bouger quelques lignes pour améliorer le vivre ensemble, le lien social, l’origine de la richesse à partager et son mode de distribution. Après les premières semaines de découvertes du fonctionnement de l’institution régionale, nous prenons maintenant nos marques tant pour faire avancer collectivement et solidairement la majorité, que pour être force de proposition, aiguillon de mesures concrètes qui mettent des coins dans l’édifice de la transformation écologique et sociale.


Permettre une saisie de l’institution régionale à travers la possibilité de pétition citoyenne, introduire un vœu pour se désengager de la mobilisation financière des banques ayant investit dans les paradis fiscaux,  contribuer à la mise en place, initiée par la précédente mandature, de la mise en place du réseau d’intérêt régional pour sortir de la logique exclusive et excluante des marchés publics en matière de formation professionnelle, proposer de systématiser l’éco-conditionnalité, réfléchir à la mise en place d’actions concrètes autour de l’agriculture, du développement durable, de l’ESS en organisant des débats thématiques ouverts sur ces différentes questions,  sont autant de pistes de travail qui sont déjà à l’œuvre ….


Cette courte expérience de quelques semaines, montre que des choses sont possibles, que les lignes peuvent bouger, mais que rien ne sera simple, et que faire de la politique pour introduire du changement, pour amorcer une transformation sociale est un combat quotidien, une danse de petits pas, que les résistances, les conservatismes, et que souvent par méconnaissance des perspectives possibles et par peur de bouger l’existant la tentative est forte.


Il va donc nous falloir conjuguer en permanence audace, subtilité et  ceci modestement.,J’insiste sur le modestement puisque l’élu, quelque soit son niveau n’est qu’un maillon au milieu d’un échiquier complexe. J’insiste sur le collectivement, parce dans une assemblée, c’est bien plus la capacité à jouer collectif pour faire bouger des lignes qui pèsera au final, mais aussi parce que l’élu, ne fait pas campagne seul et ne réalise pas son mandat seul ; sans les acteurs de terrains , aucune ligne de bougera


Nous sommes davantage des relais, des animateurs, des accompagnateurs , des catalyseurs. 


Pour autant, l’action politique est indispensable. Comme dirait P. Rhabi, c’est la part du colibri.


Pour citation, la très jolie légende du colibri présentée par Pierre Rahbi  

Un jour, il y eut un immense incendie de forêt. Tous les animaux terrifiés, atterrés, observaient impuissants le désastre. Seul le petit colibri s'activait, allant chercher quelques gouttes avec son bec pour les jeter sur le feu. Après un moment, le tatou, agacé par cette agitation dérisoire, lui dit: "Colibri! Tu n'es pas fou?! Tu crois que c'est avec ces gouttes d'eau que tu vas éteindre le feu?!" Et le colibri lui répondit : "Non, mais, je fais ma part." 


Patricia Andriot

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